Les Cyborgs
Au 22ème siècle, les perfectionnements médicaux étaient tels qu’on pouvait littéralement se passer de créer des cyborgs, qui ont toujours causés des problèmes. Et puis, il y a eu la Guerre Éternelle, et les premiers constats des affrontements face aux Hengeyokaïs. Et cela a tout changé jusqu’au 23ème siècle.
Pour faire simple, un simple soldat, sans être protégé par une Military Battle Suit, n’a aucune chance de faire le poids devant un fantassin alien qui a en général la taille d’une voiture, un blindage monstrueux et la puissance de feu d’un tank. Il fallait trouver une parade, ce furent les cyborgs. Les premiers étaient vaguement humanoïdes et le plus souvent de poids et de proportions hors-normes. La seconde génération était nettement plus proche de l’humain, mais un simple examen visuel ne laissait aucun doute. La troisième génération, celle qu’on emploie systématiquement pour les corps civils, est quant à elle indiscernable sauf examen minutieux, d’un corps humain.
1- Présentation
Un cyborg, au 23ème siècle, ce n’est pas un être plus ou moins mi-humain, mi-machine, mais un individu dont on n’a conservé du corps d’origine que le noyau cérébral, c’est-à-dire le cerveau et une partie de l’épine dorsale. C’est tout ce dernier point qui est le plus essentiel dans la nature des cyborgs, car leur corps, aussi précieux soit-il, n’est qu’un vaisseau, qui est littéralement interchangeable selon les besoins. Leur seule identité biologique, finalement, ce n’est plus que ce noyau cérébral et encore, puisque la gestion de leur corps artificiel exige une symbiose permanente avec une I.A T2 intégrée.
S’il existe trois générations de corps cybernétiques, un personnage-joueur ne peut incarner qu’un cyborg de troisième génération. Un corps de cyborg moderne est indiscernable par un examen simple d’un corps biologique et vivant. Sa structure est constituée d’une charpente de graphane, articulée de manière similaire à un squelette humain, recouvert de toute la structure musculaire de myomères qui permet de l’animer. Une seconde couche souple de treillis blindé assure l’isolation de l’ensemble ; enfin, une couche d’épiderme, imitant une vraie peau biologique, innervée et qui peut saigner, recouvre le tout. Comme un corps de cyborg émet de la chaleur, les cyborgs ont une température corporelle moyenne de 35°C. Les organes artificiels sont tous biocybernétiques, c’est-à-dire constitués en grande partie de cellules artificielles fonctionnant de concert avec de la biomécanique. Ils imitent les principales fonctions biologiques. Ainsi, un cyborg respire, mange et boit, a besoin d’aller aux toilettes comme de dormir. Enfin, le système nerveux est piloté par un système expert (un T2) directement relié au noyau cérébral, mais qui reste une boite noire qu’il est impossible de pénétrer à distance. Contrairement aux premières générations, on ne pirate plus un cyborg ; en tout cas, pas par cette voie-là. L’alimentation en énergie de la charpente d’un cyborg exige qu’il boive et mange, mais aussi l’utilisation de six piles Shipstone, dont la durée de vie sera d’un mois. Pour faciliter les opérations de maintenance, il n’y a pas de moyen de rechargement de ses piles sans les extraire, mais leur extraction est des plus simples. Elles sont en général logées au niveau des côtes, des aisselles ou des hanches et accessibles par des clapets automatiques.
Pour résumer, un corps de cyborg de troisième génération, même de type civil, comme celui décrit ici, est d’une solidité et d’une résistance formidable ; il est peu soumis aux effets des extrêmes climatiques, résiste considérablement au feu et aux balles et peut même encaisser l’impact d’une voiture lancée à soixante kilomètre-heure sans trop avoir de soucis à se faire. Un cyborg a des sens et des réflexes développés, une précision remarquable et, enfin, une endurance et une force physique hors-normes. Un cyborg civil peut courir à 50km/hr pendant plus d’une minute et peut arriver à tordre une barre à mine.
2- Pourquoi devient-on cyborg ?
On en parle par ailleurs, mais la cybernétique, ça n’est pas mode : c’est rare, très réglementé et pas forcément si glamour que cela ; on ne se cybernétise pas totalement sur un coup de tête. La plupart des cyborgs ont servi dans l’armée, principalement StarForce, ou dans des unités d’élite de la police ou de force de sécurité.
Dans le premier cas, le plus courant, il s’agit d’individus en vieillesse avancée et/ou en fin de vie (maladie ou handicap incurables), mais dont le cerveau est en parfait état de fonctionnement. Ces personnes s’engagent militairement avec des forces de police, une armée ou StarForce, et passent contrat concernant le remplacement de leur corps biologique. Ils restent engagés de manière irrévocable pour la durée de leur service et, une fois celui-ci terminé, on leur fournit un corps civil qui reste leur propriété. Ce dernier est limité en terme de performances, même s’il reste particulièrement solide et puissant et qu’il est connu qu’on peut l’upgrader, y compris illégalement.
Le second cas est celui de bioïdes qu’on cybernétise une fois « adultes » pour les intégrer à des unités de terrain d’opération hors-sol. C’est un destin peu enviable, mais l’UNE force à faire respecter les mêmes lois et contrats que pour les humains ; certains états et consortiums ne l’entendent pas forcément de cette oreille, mais dans ce domaine, les abus sont peu courant : un bioïde cybernétisé qui viendrait à se révolter est une véritable catastrophe en puissance.
Il reste enfin le cas, peu répandu et souvent complètement illégal, de bricoler des documents attestant de la nécessité d’une cybernétisation complète, puis de se mettre au service d’une force de sécurité civile ou privée. Il existe même des cas où la cybernétisation se fait complètement sous le manteau en toute illégalité. Mais c’est très rare : il faut disposer de structures performantes et de grandes compétences pour créer un cyborg et cela ne se fait pas par un médecin véreux dans un coin de rue.
A noter qu’une fois cyborg, il n’y a aucun moyen de faire machine arrière : on ne peut pas vous rendre de corps biologique. Malgré toutes les avancées du clonage et des greffes, il est impossible de réimplanter un noyau cérébral dans un corps humain ; c’est la mort assurée.
3- Un peu d’histoire
Techniquement, la possibilité de fabriquer des cyborgs date des années 2130 à 2140. Mais la robotique fait aussi bien et ce n’est que pendant la Guerre des Ten Stars, entre 2138 et 2142 que les consortiums et leurs armées se jetèrent sur cette technologie jusque-là peu exploitée pour faire pencher la balance dans leur conflit. Mais la technique des augmentations cybernétiques n’était guère au point, les résultats ne furent pas probants et, surtout, les premiers cyborgs causèrent autrement plus de problèmes et de dommages qu’ils n’étaient censé en régler : difficile de maitriser des mercenaires rendus surpuissants par des implants et des améliorations exotiques et hors de contrôle. De plus, le trafic pratiquement déréglementé de ces technologies provoquait d’autres catastrophes sanitaires et criminelles. L’UNE mit le holà sur ces pratiques en légiférant sévèrement, suivi, pour une fois, par la plupart des états non-membres. Après tout, eux aussi avaient soufferts des ravages de la mode biocybernétique durant la guerre et personne n’avait envie de revivre ça.
C’est quarante ans plus tard, sous la pression des conséquences de la Guerre Éternelle, que sera relancée la création de cyborgs à noyau cérébral. Le principe est purement militaire à la base : le cyborg est solide et il est versatile. Un individu cybernétisé peut tout aussi bien intégrer un corps tout à fait humain de troisième génération que le cœur d’une Military Battle Suit de six mètres de haut. Il suffit de transférer son noyau cérébral, le temps de l’adaptation à son nouveau corps.
Les cyborgs de première génération, très voyants, avec des charpentes humanoïdes très vastes, qui pèsent souvent plusieurs centaines de kilos et une apparence dérangeante et robotique datent des années 2140. La seconde génération, plus humanoïde et discrète, a été conçue vers 2170. Quant à la troisième génération, elle a commencé à se répandre à partir de 2185. Il reste très peu de premières générations, sauf dans des régions où on n’hésite pas à fabriquer ou recycler des charpentes illégales sans trop se soucier de leur aspect et des lois internationales. Les secondes générations sont encore assez répandues, entre autres dans le domaine de la sécurité privé et militaire. Quant à la troisième génération, elle est la plus récente et la plus privilégiée pour fournir des corps civils aux vétérans et retraités de StarForce et des forces de sécurité fédérale.
Il faut comprendre –voire plus bas- que la vie des cyborgs n’est pas si facile que cela sur bien des points. Les gens en bonne santé volontairement cybernétisés, par intérêt, sont rares. Légalement, c’est un secteur très surveillé. Mais vu les avantages tactiques que représente un cyborg, il y a forcément tout un trafic, dans le mercenariat, qui reste florissant, malgré tous les écueils que cela représente.
4- Règlementations et place dans la société
De par leur nature même, les cyborgs sont particulièrement réglementés et contrôlés. Ils ont du mal à passer inaperçus, même les troisièmes générations : si un examen visuel ou tactile même attentif n’est pas suffisant et peut même tromper les chiens, les simples scans à l’entrée des magasins et des bureaux les repèrent de suite. Pareil pour les scans de la sécurité urbaine, reliés à la police, qui repèrent assez facilement un cyborg qui passe devant leur scanner. D’autre part, le bon fonctionnement, la survie, même, d’un cyborg, impose une maintenance mensuelle, en clinique, assez lourde, ce qui le rend facile à suivre et tracer. Le cyborg inconnu qui fait un massacre puis disparait sans laisser de trace, c’est rarissime … et plutôt une mauvaise nouvelle.
Mais vu qu’il est impossible de réimplanter un noyau cérébral dans un corps biologique, les vétérans et retraités cyborgs doivent bien vivre leur vie avec leur corps biomécanique hors-norme, même si les versions civiles sont moindres dans ce domaine que les versions militarisées. Aussi, les lois de l’UNE imposent un contrôle strict et un suivi constant des cyborgs, dans les limites des lois sur la liberté des individus. Bref, un cyborg doit vivre avec le fait que c’est affiché partout où il va et qu’il doit montrer patte-blanche régulièrement. Il est interdit d’empêcher l’accès à des lieux publics et commerces à un cyborg, qui a les mêmes droits que tout le monde mais cet interdit est régulièrement détourné ou bafoué, ou simplement rendu compliqué, surtout dans les secteurs sensibles.
Et pourtant, des cyborgs, il y en a un peu partout, même s’ils ne sont pas si nombreux que cela. En tant que forces d’intervention et gardes-du-corps, ou agents actifs en milieu hostile, ils sont particulièrement efficace. Aussi, ils sont très recherchés et on les retrouve dans les unités de police, de sécurité d’état ou de consortium et ils forment une sorte d’élite dans leur domaine. Et ils ne sont pas forcément discriminés ou craints, ou du moins pas tant que cela, dans le monde civil. Oui, ils font peur, mais les incidents impliquant des cyborgs sont rares : il n’y a pratiquement pas d’affaire de cyberpsychose meurtrière autour de leur image. Plutôt une crainte liée à leurs exactions dans des forces mercenaires et des forces armées, où ils sont forcément redoutablement efficaces et notoirement réputés insensibles et peu « humains ». Et puis de temps en temps, il y a des affaires criminelles, où des cyborgs sont impliquées. Et, dans ces cas-là, c’est toujours assez compliqué et risqué, ce qui fait la joie des journaux.
5- Le blues des cyborgs
La plupart des cyborgs, en fin de compte, sont d’anciens malades incurables ou des personnes très âgées ou en fin de vie ayant signé pour entrer dans l’armée face aux Hengeyokaï, afin d’espérer une seconde chance une fois revenu à la vie civile… s’ils ont survécu. Les autres sont dans une situation qui les mets de facto en marge de la société, qu’ils soient bioïdes cybernétisés sans leur demander leur avis ou personnes ayant décidé de contourner la loi pour y parvenir.
Dans une charpente de cyborg civil, un individu peut espérer vivre quelques décennies. Tant que le cerveau n’est pas rattrapé par la sénescence et que les maintenances sont efficaces, le corps tiendra le coup, sans jamais vieillir ni faiblir. Mais concernant les gens qui furent homo sapiens et désormais qui sont des cyborgs, ils ne sont plus les individus qu’ils furent autrefois, aussi bien pour la société, pour leurs proches et pour eux-mêmes.
Finalement, ils ont du mal à savoir non seulement quelle est leur place dans un monde qui les craint à raison et se prémunie contre le risque qu’ils représentent, mais qui sont-ils vraiment eux-mêmes. Leur corps est artificiel, il pourrait tout aussi bien être la copie d’un autre que produit en série. Leur visage, leur regard, leur identité sont ceux d’une machine imitant la vie, non leur identité propre. Il en va de même pour les altérations de leurs sensations et leur rapport à leur corps. Il n’y a pratiquement pas de décalage entre le corps et l’esprit d’un cyborg, mais ces derniers sont pourtant plus puissants physiquement. Cette différence est à la source d’un effet de dissociation entre le corps de machine et l’esprit biologique des cyborgs.
Et cela engendre souvent des blues, des questionnements intimes profond, voir des épisodes dépressifs ou des décompensations brutales avec des prises de risques insensées, motivées par le besoin irrépressible pour le cyborg de vérifier s’il est humain. Certains d’entre eux finissent même par se dépersonnaliser complètement, leur empathie ne survivant pas à l’épreuve du temps passé dans la machine. Quand ces troubles n’ont pas été remarqués et pris en charge à temps, cela conduit parfois à des drames catastrophiques.